
Les dernières mises aux normes et les passoires thermiques concernent cette année plus que jamais la location d’appartement et de maison.
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, impose désormais un certain nombre de mises aux normes. Un logement s’entretient au quotidien, mais encore faut-il savoir quels sont les différentes répartitions des tâches entre propriétaires et locataires. Nos professeurs IESCA se sont penchés sur ces modifications pour vous proposer un résumé de ces réformes. Je vous propose d’aborder les normes les plus « traditionnelles » mais aussi de faire un point précis sur les passoires thermiques qui depuis le 1er janvier 2003 concernent toutes gestions locatives. Commençons par celles devenues classiques…
Le détecteur avertisseur autonome de fumée (Daaf) :
Comme son nom l’indique, cet appareil « détecte » les fumées et émet un signal sonore particulièrement strident pour avertir une personne endormie. Le Daaf doit être disposé dans tous les logements. A la charge de qui est-il ? Locataire ou bailleur ? Le code de la construction et de l’habitation dans ses articles R142-1 à R142-5 dispose que le bailleur est dans l’obligation d’installer l’appareil. Des précisions sont apportées quant à la mise en place en fonction des pièces du logement : chambres, couloir… avec toujours dans les appartements plus petits (type studio) un éloignement assez suffisant de la cuisine ou de la salle de bain. Lors de la location le bailleur, ou l’agent immobilier mandaté vérifiera qu’il est en bon état de fonctionnement, mais ensuite c’est au locataire de suivre son évolution, c’est-à-dire sa vétusté au niveau des piles ou de son utilisation. Dans le cas de non fonctionnement il assurera son remplacement. Des exceptions existent : le logement saisonnier, la location meublée, ou la résidence avec service (comme une résidence senior) ; en l’espèce, le locataire s’adressera alors au propriétaire bailleur, ou à l’agent mandaté pour réclamer un remplacement.
Remise aux normes des réseaux électriques ou de gaz :
Il arrive que les réseaux d’électricité et de gaz dans certaines villes soient obligés eux aussi de se remettre aux normes… ce sont des travaux importants. Le logement proposé à la location ne doit présenter aucun risque pour la sécurité des locataires et le propriétaire sera dans l’obligation de réaliser les travaux de mise en conformité. Le problème se pose quand le bailleur conteste voire refuse la réalisation des travaux. Que faire ? … D’abord l’envoi par le locataire d’une LRAR. Le propriétaire/bailleur dispose de deux mois pour répondre. A ce terme si rien n’est proposé, le locataire peut saisir la commission départementale ou le greffe du tribunal judiciaire dont dépend le logement. Le juge a deux possibilités soit obliger le propriétaire à réaliser les travaux et octroyer au locataire des dommages et intérêts, soit autoriser le locataire à réaliser les travaux et obtenir ensuite des dommages et intérêts, mais attention pas d’intervention sans qu’un juge se soit prononcé.
Le locataire interviendra spontanément pour réparer les appareils électriques ou les équipements qu’il aurait dégradé, volontairement ou non. De même il prendra en charge spontanément les interrupteurs, les prises de courant, les coupe circuits et fusibles, et autres ampoules…
La mise aux normes du chauffage collectif : La date d’allumage et d’arrêt du chauffage central pour l’automne-hiver 2022-2023.
Les annonces récentes sur la baisse des températures d’un appartement peuvent poser problème à un locataire ou à un copropriétaire désormais. La question qui se pose avec les derniers conseils gouvernementaux, concerne la température minimale à assurer dans un logement en cas de chauffage collectif ?
La loi ne donne aucune précision, aucune date légale d’allumage du chauffage ni de date de mise en route du chauffage collectif, ce qui peut vite provoquer des mésententes. Pas de caractère légalement obligatoire donc pas d’obligation ni de sanction : la décision est laissée à l’appréciation des habitants et du syndic de copropriété. Le plus souvent le règlement intérieur autorise le syndic à faire passer en cas de désaccord, un chauffagiste pour déterminer le moment et trancher ainsi le problème. En 2022 la date de mise en marche avait été retenue autour du 15 octobre. En 2023 son arrêt est généralement programmé mi-avril.
La procédure si rien ne bouge ? La mise en marche ou l’interruption (qui parfois peut être nécessaire plus tôt du fait de la modification climatique ou de la région) du chauffage collectif doit être demandée au conseil syndical de la copropriété. Lorsque la demande est acceptée, elle est communiquée au syndic, à charge pour lui de faire intervenir le chauffagiste. La règle désormais veut que la température intérieure soit inférieure à 19 degrés pour que la demande de remise en marche ou de maintien du chauffage collectif soit acceptable. Si le conseil syndical refuse la demande des habitants de l’immeuble, ceux-ci n’ont pas de recours pour obtenir gain de cause.
La mise aux normes des rénovations énergétiques:
Le 1er Janvier 2025 pour qu’un logement puisse être qualifié de « décent et sans risque », pour une location vide ou meublée à usage de résidence principale, le niveau de performance énergétique minimal sera rehaussé.
On le savait déjà : fin des passoires thermiques et obligations des bailleurs de mises aux normes des appartements visés F et G à défaut de les voir retirés du marché.
• Première étape en 2025 les logements classés G seront interdits à la location. Les logements classés F auront un sursis jusqu’en 2028 Puis … en 2034 on se tournera vers les logements classés E. Ainsi à partir de cette date, le niveau de performance d’un logement décent sera donc compris entre la classe A et la classe D.
A compter du moment où le DPE (diagnostic de performance énergétique) est remis obligatoirement au locataire à la signature du bail … pas d’impasse. De surcroit ce diagnostic de performance énergétique a été revu avec précision depuis le 1er juillet 2021 pour plus de précision et de compréhension … Conclusion : il y aura deux types de DPE, ceux réalisés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 qui seront estimés valides jusqu'au 31 décembre 2024, et ceux rédigés avant le 1er janvier 2018 qui par contre deviendront obsolètes et ne peuvent donc plus être utilisés.
Quelle solution pour le propriétaire si ce n’est l’obligation de réaliser les travaux ?
Si le propriétaire loue sans respecter les normes du seuil minimal de performance énergétique, le locataire disposera d'un recours contre lui. La démarche amiable débutera par une demande au bailleur de mise en conformité du logement par la réalisation de travaux de rénovation énergétique et d'isolation. À défaut d’accord amiable ou à défaut de réponse du propriétaire dans les deux mois d’une LRAR, le locataire se tournera vers la commission départementale de conciliation. Ou alors se dirigera vers le tribunal judicaire.
La sanction est sévère : le juge pourra :
• Obliger le propriétaire à faire les travaux nécessaires ;
• Ordonner une réduction de loyer ;
• Condamner le bailleur à des dommages et intérêts à payer au locataire.
Mais comme à tout principe juridique il y a des exceptions…Ainsi pourront échapper à l'obligation d'effectuer des travaux leur permettant d'atteindre le niveau de performance énergétique minimal requis :
• Les logements en copropriété si le copropriétaire concerné prouve que, malgré les mesures prises pour obtenir le résultat attendu relevant des parties communes ou d’équipements communs et le résultat de travaux réalisés dans les parties privatives du lot concerné par les normes prévues, il n’a pu atteindre le niveau requis.
• Les logements soumis à des obligations architecturales ou patrimoniales, qui imposent des règles en opposition avec les attentes réclamées par les normes mais toujours en prouvant la réalisation de sa part de travaux possibles avec ces obligations.
Les difficultés d’applications :
Les exigences de la transition énergétique prises par le législateur sont organisées dans le temps, mais elles sont là et inexorablement elles s’appliqueront.Elles sont neuves donc perturbantes, contraignantes et parfois même jugées, diront les professionnels de l’immobilier… irréalistes, car imposées dans un contexte de crise, d’inflation, de pandémie qui ont étouffé une offre locative déjà jugée insuffisante. Le fait est que les logements finiront par se soumettre aux règles et aux normes, à défaut pour le bailleur de ne plus pouvoir louer.
Mais si les sanctions s'appliquent sans discussion pour le bailleur lorsqu'un logement à la location ne respecte pas les normes de performance énergétique entrées en vigueur avant la signature du bail, on peut s’interroger sur la possibilité pour le locataire déjà en place de prétendre revendiquer le respect des nouveaux seuils.A ce moment de 2023 cette question n'est pas tranchée par la loi ou la jurisprudence trop fraiche ; il faut davantage se tourner vers les commentateurs ou la doctrine. La plupart observent ainsi qu'un locataire en place serait en mesure de demander le respect de la norme nouvelle, au moins à compter de la tacite reconduction du bail. Pour cela les observateurs considèrent que les notions de « performance énergétique » entre alors dans ce que la loi retient pour le bailleur de la mise à disposition d’un local « décent » … « décence » qui lui donnerait un droit à revendication en cours de bail. Cependant pour s’être penché sur ce point, l’ANIL remarque que « Les décisions disponibles (en jurisprudence) montrent qu’assez peu d’actions sont introduites par les locataires en raison de la non-décence du logement. Le plus souvent, les locataires tentent de se faire justice eux-mêmes en interrompant le paiement des loyers. Or, les jugements leur sont rarement favorables, car les tribunaux s’appuient sur une position très ferme de la Cour de cassation, qui n’admet l’exception d’inexécution que dans des circonstances très particulières »
La loi climat : Le gel des loyers des passoires thermiques:
La loi « climat » contient toute une série de mesures visant à interdire la hausse du loyer des logements énergivores classés F et G (consommation énergétique est supérieure à 450 kWh/m²), au moment de la signature d’un nouveau contrat de location comme en cours de bail et ce depuis le 1er janvier
• Désormais les baux en cours continuent, mais les logements visés par la loi climat étant désormais considérés comme non décents. Ils ne peuvent faire l’objet d’un nouveau bail, sauf à réaliser les travaux de mise aux normes. Un délai de réalisation est laissé : dans le délai d’un an à compter du 24 aout 2022 en métropole, soit jusqu’au 25 aout 2023 ; et jusqu’au 1er juillet 2024 en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte.
• Par ailleurs s’impose également l’interdiction d’augmentation des loyers à la relocation pour les logements classés F et G. Depuis le 24 août 2022. Hors zone tendue, lorsqu’un logement de la classe F ou de la classe G fait l’objet d’une nouvelle location, le loyer du nouveau contrat de location ne peut dépasser le dernier loyer appliqué au précédent locataire. Plus d’augmentation de loyer.
• Enfin les baux d’habitation à usage de résidence principale du locataire, logement vide ou meublé, renferment tous une clause d’indexation permettant la révision du loyer à chaque date anniversaire du bail … désormais pour les contrats de location conclus ou tacitement reconduits depuis le 24 août 2022 (après le 1er juillet 2024 outre-mer), cette indexation du loyer ne peut plus être appliquée pour les logements des classes F et G. Le loyer de ces logements ne peut plus augmenter en cours de bail ; il est… gelé.
Cette loi climat fixe l’écologie dans notre société, c’est une évolution et une prise de conscience par les services publics ; modes de consommation, de production, d’urbanisme, de transports… le signal est partout ; il est important et difficile comme tout changement… mais sans doute aussi vertueux que nécessaire.
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